


Introduction
Je suis particulièrement heureux d’être parmi vous aujourd’hui et d’intervenir après mon ami Pierre Sans, directeur de l’ENVT, que je remercie vivement d’avoir accepté d’accueillir ce séminaire dans cette Ecole vétérinaire à laquelle je suis très attaché.
La FSVF n’est pas un organisme de formation continue. En organisant ce séminaire destiné plus particulièrement aux vétérinaires, tout en étant ouvert aux partenaires qui souhaitent agir au service de la transition agroécologique de l’élevage, notre objectif aujourd’hui est de créer les conditions d’un dialogue entre l’ensemble des parties prenantes, des éleveurs et de leurs organisations jusqu’à nos concitoyens et aux organisations de la société civile. Nous souhaitons ainsi que les vétérinaires puissent contribuer, à leur place, à l’effort de transition agroécologique de l’élevage.
L’idée d’un séminaire sur ce sujet est née il y a bientôt 2 ans, dans le cadre des travaux que nous menons au sein de l’Alliance Santé-Biodiversité. Un mot sur cette Alliance, qui est un collectif informel réunissant aujourd’hui 8 organisations - vous pouvez les retrouver en dernière page du programme qui vous a été remis – ainsi qu’un ensemble de personnalités à titre individuel.
Nous devons la création de cette Alliance, ainsi que sa force et sa vitalité, à Gilles Pipien. Gilles a été l’initiateur du premier Plan National Santé-Environnement lorsqu’il était directeur de cabinet de la ministre de l’environnement Roselyne Bachelot. Et, depuis, il ne cesse de se mobiliser afin que nos enfants et petits-enfants puissent bénéficier d’une vie saine dans un environnement sain.
Lorsque l’on est vétérinaire et que l’on s’intéresse aux enjeux de santé, celle des animaux bien entendu mais aussi celle des humains dans un monde dont on sait que les ressources sont limitées, on cherche naturellement à comprendre les liens entre les productions animales, notre alimentation et l’ensemble de nos systèmes alimentaires, « de l’étable à la table » ou « de la fourche à la fourchette » selon les expressions consacrées.
La profession vétérinaire est engagée de longue date pour mettre en oeuvre sur le terrain le concept « One Health – Une seule santé », en particulier dans le domaine des zoonoses, des maladies infectieuses émergentes, d’une approche globale et intégrée de la sécurité sanitaire de la chaîne alimentaire, de l’antibiorésistance et plus largement du bon usage des médicaments vétérinaires ou de l’évolution des pratiques médicales et chirurgicales. En veillant à la santé et au bien-être 3 des animaux dans leur pratique quotidienne, les vétérinaires praticiens contribuent à la réduction de l’empreinte carbone de l’élevage et plus largement à la durabilité des systèmes alimentaires.
Les attentes des nouvelles générations de vétérinaires, comme la création d’associations telles que EcoVéto ou Vétérinaires Pour la Biodiversité - qui viennent de lancer une enquête nationale autour des enjeux environnementaux liés à la médecine vétérinaire -, montrent que la profession vétérinaire est pleinement mobilisée.
Bien entendu, les écoles vétérinaires s’emparent du sujet de la transition agroécologique. L’ENVT est en pointe dans ce domaine ; nous le verrons avec l’intervention d’Alain Ducos cet après-midi, que je remercie pour son implication et son aide. Nous le verrons également avec l’intervention de Philippe Jacquiet qui présentera les travaux conduits par le Réseau Français pour la Santé Animale dans le domaine des antiparasitaires. La SNGTV est aussi très active sur le plan technique et nous pourrons écouter Philippe Camuset, qui présentera la démarche d’un praticien pour une gestion raisonnée du parasitisme au sein de sa clientèle, au bénéfice des revenus de l’éleveur comme des impacts écologiques des antiparasitaires.
Cependant, il apparaît aujourd’hui que la transition écologique implique d’aller au-delà des approches liées aux pratiques vétérinaires. Il convient désormais de les intégrer à toutes les 4 dimensions qui structurent le fonctionnement des productions animales et plus largement de nos systèmes alimentaires. En effet, les liens entre productions végétales et animales, dans leurs relations avec les enjeux environnementaux liés au climat, à la biodiversité, à la préservation des ressources naturelles, mais aussi avec les enjeux de santé publique liés à l’équilibre nutritionnel de notre alimentation, sont multiples, complexes et interconnectés.
Mieux comprendre ces liens pour agir efficacement avec les éleveurs et leurs organisations, afin d’accélérer la transition agroécologique de l’élevage dans un cadre de durabilité des systèmes alimentaires, c’est l’objectif du séminaire qui nous rassemble aujourd’hui.
Après la première session de cette matinée qui sera consacrée à l’approche systémique des enjeux et de leurs interdépendances, nous poursuivrons cet après-midi avec une deuxième session pour comprendre les freins et identifier les leviers qui permettent d’engager la transformation nécessaire des filières de production animale.
Une pause, accompagnée de trois témoignages sur les enjeux de transition agroécologique de l’élevage, vous sera proposée à l’issue de cette deuxième session. Nous vous invitons à écouter Pascal Ferey, président de la chambre d’agriculture de la Manche, Bernard Bonnefoy, président de l’association Fin Gras du Meyzenc ainsi qu’un extrait du documentaire « Epidémies, l’empreinte de l’homme », qui permet de 5 découvrir les travaux de Jean-François Guégan, écologue de la santé à INRAE mais également président du conseil scientifique de l’ENVT.
Nous terminerons notre séminaire par une troisième et dernière session présentant des solutions relevant de la transition agroécologique, qu’elles soient issues des travaux de recherche ou de la pratique de la médecine vétérinaire. Bernard Chevassus-au-Louis, dont il n’est pas utile de rappeler la brillante carrière scientifique, conclura notre journée en tant que Président de l’association Humanité et Biodiversité. Je l’en remercie vivement.
Je tiens à remercier toutes celles et ceux qui ont contribué à la préparation de cette journée. Je ne peux pas tous les citer, mais je pense en particulier à ma consoeur Hélène Soubelet, qui a animé le comité scientifique pour la construction du programme, aux équipes de l’ENVT et à Anne Daumas pour l’organisation et l’appui matériel et logistique ainsi qu’à mon prédécesseur à la FSVF, Benoit Assémat, qui a inspiré ce séminaire et m’a accompagné dans sa concrétisation.
Je termine par un point : certains pourraient s’étonner que plus de la moitié des interventions relèvent de chercheurs de l’INRAE. Ce choix est lié au fait que, pour cette première journée organisée par la profession vétérinaire sur le thème de l’agroécologie appliquée aux productions animales, nous avons souhaité nous appuyer sur ce que dit la science. Et nous avons la chance d’avoir en France le premier organisme de 6 recherche au niveau mondial sur le continuum agriculture-alimentation-environnement, en pointe sur l’agroécologie.
Mon dernier mot sera justement pour signaler la parution récente d’un excellent ouvrage publié par la collection « Que sais-je ? » sur l’agroécologie. Il est signé par le PDG de l’INRAE et deux des directeurs scientifiques de cet organisme. Je cite un extrait de cet ouvrage : « L’agroécologie est une manière de concevoir des systèmes de production agricole en s’appuyant sur la biodiversité afin de tirer profit de processus naturels, de maintenir voire d’augmenter la production agricole et la qualité des produits et de réduire le recours aux intrants. En optimisant les systèmes, elle permet de diminuer les pressions sur l’environnement et de préserver les ressources naturelles ». Bref, l’agroécologie, ce n’est pas la décroissance, mais bien l’outil qui permet de relier les objectifs de durabilité de nos systèmes de production à ceux de sécurité, de résilience ou de souveraineté alimentaire.
En vous souhaitant une journée riche d’échanges, je passe immédiatement la parole à Alain Ducos, professeur de génétique, zootechnie et agroécologie à l’ENVT, qui va assurer l’animation de cette matinée.